Qu’est ce que l’hépatite C ? Qu’est ce qu’un hépatite C chronique ? Comment attrape-t-on l’hépatite C ? Quelles sont les situations de prises de risques ? Quels sont les différents types d’hépatites virales ?

1. L’hépatite C : c’est quoi ?

L’hépatite [1] est une maladie qui détruit les cellules du foie [2] et peut être due à : des toxines, des médicaments, certaines maladies, une consommation importante d’alcool, ou à une infection bactérienne ou virale.
Dans le cas de l’hépatite C, c’est le virus de l’hépatite C (ou VHC) qui est responsable d’une infection du foie ; parce qu’elle est causée par un virus, on dit qu’il s’agit d’une hépatite virale. L’hépatite C peut être soit aigüe et durer quelques mois, soit chronique, et affecter le foie pendant des années.
L’hépatite C aigüe est le résultat de la première infection par le virus. Cette infection peut passer inaperçue : elle est souvent asymptomatique [3] ou ne cause qu’un état de fatigue passager.
Lors de ce premier contact, le système immunitaire produit des anticorps contre le virus. Ces molécules sont spécifiques au VHC et restent en circulation dans le sang à vie. Ce sont ces anticorps qui attestent de l’exposition au virus, et qui sont recherchés lors du dépistage : on dit que l’on est séropositif au VHC lorsque ces anticorps sont détectés dans le sérum [4]. C’est parce que, bien souvent, on ne ressent pas les symptômes de l’infection, qu’il faut recourir au dépistage pour savoir si l’on a été contaminé.
  • L’hépatite C aigüe
L’infection aigüe est une infection courte et intense. Elle dure environ 6 à 8 semaines puis, pour un quart des personnes infectées, elle peut se résorber avec le temps.
Pour les trois autres quarts des personnes infectées, l’infection progresse et, si le virus est toujours présent 6 mois après l’infection aigüe, on dit que l’infection devient chronique.
  • L’hépatite C chronique
L’infection chronique peut être asymptomatique pendant des années – ce qui explique qu’un grand nombre de personnes ne sachent pas qu’elles sont séropositives au VHC. Pour trois personnes sur quatre, l’infection chronique abîme modérément et lentement le foie, en causant des fibroses [5]. En revanche, pour une personne sur quatre, l’hépatite chronique peut évoluer vers la cirrhose [6], l’insuffisance hépatique et le cancer du foie. Non traitée, elle peut causer la mort.
À toutes les étapes de l’infection, l’hépatite C est traitable et on peut souvent en guérir (voir notre article sur les traitements : « Le VHC, prise en charge thérapeutique actuelle »). Cependant, pour de meilleures chances de réussite, il vaut mieux la traiter avant l’apparition des symptômes de l’infection chronique.

1.1  Comment ça s’attrape ?

Le virus de l’hépatite C se transmet par voie sanguine. Il est très infectieux : une petite quantité de sang infecté suffit à transmettre le virus – de plus, et il survit longtemps à l’air libre (jusqu’à 1 semaine).
Une des voies de transmission les plus communes est le partage de matériel d’injection avec une personne séropositive au VHC (seringue mais aussi cuillère, filtre, coton, etc.) quand il y a contact sanguin, souvent indirect. Mais il y en a d’autres.
En France et avant 1992, le VHC pouvait aussi se transmettre lors de transfusions sanguines ou d’interventions chirurgicales mais aujourd’hui les échantillons de sang sont testés et l’équipement stérilisé. D’autres pays ont aussi connu des transmissions du VHC à travers des campagnes de vaccinations, où le matériel utilisé n’était pas stérile ou à usage unique. Si en France, le risque d’infection nosocomiale [7] est aujourd’hui très faible, dans d’autres pays les prévalences d’infection à VHC sont plus élevées et il est recommandé d’être vigilant quant à la stérilité des instruments lorsque l’on doit se faire soigner.

1.2  Quelles sont les situations de prises de risques ?

Pour savoir si vous prenez un risque concernant le VHC, il faut se rappeler d’une chose : la voie de transmission est sanguine. Ce sont les situations où il peut y avoir contact sanguin, même indirect, avec une personne séropositive au VHC qui sont à surveiller.
  • Le tatouage et le piercing :
Parce que le VHC s’attrape par contact sanguin, il faut s’assurer que le salon que vous choisissez est propre, que les tatoueurs et les perceurs portent des gants et que tout ce qui touche votre peau (équipement, encre, cotton, etc.) soit neuf, stérilisé ou à usage unique. Vous pouvez demander des garanties sur la stérilisation du matériel.
  • Prendre des drogues :
L’usage de drogues se fait la plupart du temps à l’aide de petits matériels susceptibles d’entrer en contact avec des traces de sang du fait de la fragilisation des muqueuses par les drogues ou de la technique employée.

> Pour le sniff : les muqueuses des parois nasales sont très fragiles : elles peuvent subir des microcoupures dues à des petits cailloux de produit ou à des pailles rigides. Ces coupures peuvent être une voie d’entrée pour le VHC : Attention à ne pas partager sa paille. Il vaut mieux préférer les pailles souples, à usage unique, roulées à partir de papier (tickets de caisse, post-it, etc.) que l’on écrase après l’avoir utilisé, pour éviter qu’elle ne soit reprise par quelqu’un d’autre plus tard dans la soirée. Attention aussi à bien écraser le produit en poudre fine avant de le sniffer pour éviter les petits cailloux.

> Pour l’injection : Attention à ne partager aucun matériel d’injection (eau, tampon alcoolisé, cuillère, coton, stérifilt, stéricup, seringue, capuchon, mouchoir), à n’utiliser aucun matériel qui a déjà été utilisé. Attention aussi au contact de sang avec les doigts ou le garrot.

> Pour la pipe à crack : il faut éviter les coupures : pendant la préparation (couteau, cutter, embout du doseur ébréché ou coupant) et pendant l’inhalation (brûlures aux lèvres et petites coupures sur les mains peuvent être des voies d’entrée du virus).

  • La voie sexuelle :
Les contacts sexuels sont une voie rare de transmission du VHC, mais on ne peut pas l’exclure. Les rapports sexuels ne peuvent être contaminants que s’il y a contact sanguin, c’est à dire coupures, abrasions ou saignements, même minimes, avant ou pendant les rapports. Il faut alors être vigilant si vous ou votre ou vos partenaires avez des plaies, des irritations, des brûlures, particulièrement sur les muqueuses du vagin, anus et gland. Il faut notamment faire attention si votre ou vos partenaires ont une ou des infections sexuellement transmissibles qui peuvent provoquer des lésions, et si elles ont leurs règles.

La charge virale VHC, c’est à dire le nombre de virus qui circulent et qui peuvent infecter une autre personne en cas de contact, est très faible dans le sperme et les sécrétions vaginales. Par contre, attention, elle est significativement plus élevée dans le sang et le sperme d’hommes co-infectés par le VIH.

Les pratiques plus hard, dans les cas où il y a risque de blessures, brûlures, de petites déchirures ou de saignements peuvent être contaminantes s’il y a un contact sanguin entre partenaires ou avec des instruments ou des accessoires contaminés.

Cette voie de transmission par rapports sexuels a fait débat ces dernières années, certains s’en servant pour stigmatiser les pratiques sexuelles gaies hard. Bien qu’un lien entre transmission du VHC et activité sexuelle ait été démontré [8], dont la transmission au sein d’un groupe d’hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes [9], elle reste faible et dépendante de contacts sanguins. Comme pour l’usage de drogue donc, des précautions sont à prendre pour éviter la transmission. Dans les contacts génitaux, capote et gel lubrifiant, réduisent les risques de saignement des muqueuses ou de la peau, et donc de contamination. Certaines pratiques hard nécessitent plus de précautions que l’on peut résumer ainsi :

> pour l’usage d’objets et de sextoys en contact avec les muqueuses, il ne faut jamais les utiliser sur plusieurs personnes et ils doivent être désinfectés soigneusement après chaque usage. Quand c’est adapté, on peut aussi les recouvrir d’un préservatif pour chaque usage ;

> pour l’emploi d’accessoires susceptibles de blesser ou de fragiliser la peau(cravache, fouet, etc.) la solution la plus simple est d’utiliser des instruments propres à la ou au receveurEUSE, ce qui ne dispense pas de les nettoyer et de les désinfecter ;

> pour le fist-fucking, il faut employer des lubrifiants adaptés en quantité suffisante, propres à chacunE et pour cELLeux qui pénètrent, ne pas forcer le passage mais prendre le temps, avoir les ongles courts et utiliser des gants appropriés, renouvelés pour chaque pénétration ;

> pour l’usage d’objets perçants ou tranchants, le risque est majeur. N’employez que des objets à usage unique, cELLeux qui les utilisent doivent porter des gants, l’environnement doit être propre.

Mais dans tous les cas, ces pratiques nécessitent un apprentissage autant de l’usage que de la sécurité. En la matière, rien ne vaut le partage de l’expérience des plus aguerriEs plutôt que les explorations en terres inconnues.

1.3  Vivre avec une personne séropositive au VHC

Dans les interactions quotidiennes, à la maison ou au travail, les risques de transmission sont extrêmement faibles [10].
Il faut simplement se garder de partager les ustensiles qui auront pu entrer en contact avec des gouttelettes de sang de la personne contaminée, c’est à dire les rasoirs, les brosses à dents, les coupe-ongles, pinces à épiler, etc.

1.4  Et les autres hépatites virales ?

Il existe 4 autres virus de l’hépatite : les virus de l’hépatite A, B, D et E.

> Le virus de l’hépatite A se transmet par voie oro-fecal, c’est à dire qu’on peut l’attraper en ingurgitant de l’eau ou des aliments qui ont été en contact avec des matières fécales contaminés ou par voie sexuelle, lors d’anulingus (rapports bouche-anus). Il existe un vaccin, aujourd’hui conseillé chez les gays.

> Le virus de l’hépatite B s’attrape par les relations sexuelles ou par le sang, c’est à dire par piqûre, transfusion, contacts sexuels non-protégés, piercing et tatouage non stériles. Il existe un vaccin, lui aussi recommandé pour l’ensemble de la population.

> L’agent delta est un virus incomplet qui provoque l’hépatite D, mais seulement chez les porteurs du virus de l’hépatite B, et touche quasi-exclusivement les usagers de drogue. Il n’existe pas de vaccin.

> Le virus E provoque l’hépatite E, une infection le plus souvent aigüe et bénigne, qui concerne principalement les pays en voie de développement. Les formes sévères sont plus fréquentes chez les personnes immuno-déprimée et les femmes enceintes.

Enfin, d’autres virus de l’hépatite ont été découverts récemment, comme les virus de l’hépatite G [11] (VGC ou GBV-C), TTT ou SEN. Celui de l’hépatite G, par exemple, est proche du virus de l’hépatite C mais il concerne près d’un quart de la population mondiale et ne provoque pas de maladie. Les effets de l’infection sont plus remarquables chez les personnes co-infectées par le VIH, pour qui le cours et le pronostic de l’infection par le VIH peuvent être améliorés [12].

Les chiffres :

170 millions : c’est le nombre de personnes concernées par le VHC dans le monde
3-4 millions : c’est le nombre de nouveaux cas d’infection. Les pays en voie de développement sont les plus touchés.
500 000 : c’est le nombre de personnes touchées en France
5000 : c’est le nombre de nouveaux cas déclarés par an en France
25% : c’est le taux de personnes séropositives au VIH, co-infectées au VHC.

2. Les gays et le VHC

L’étude HEPAIG, la co-infection et la transmission sexuelle du VHC : un train peut en cacher un autre…
Cet article tente de synthétiser l’ensemble des données recueillies sur les gays et l’hépatite C. Il ne répond certainement pas à tout mais donne une bonne idée des pistes actuelles.
Cet article présente et discute les résultats du volet qualitatif de l’étude HEPAIG, dont le but était de décrire des trajectoires de gays séropositifs ayant été également diagnostiqués pour une hépatite C aigüe.

3. Épidémio et traitement

Le virus de l’hépatite C (VHC) peut aboutir à une infection chronique du foie et entrainer à long terme des complications graves (cirrhose, carcinome hépatocellulaire). Depuis fin 2013 avec l’arrivée des antiviraux à action directs (AAD), les traitements de l’hépatite C ont beaucoup progressé, permettant 95% de guérison avec des durées de traitement allant de 8 à 12 semaines et avec un très bon profil de tolérance.

4. Autres publications

De nombreux cas de transmission sexuelle du virus de l’hépatite C ont été rapportés ces dernières années chez des séropositifs homosexuels. Une étude hollandaise apporte des informations supplémentaires sur l’ampleur de cette nouvelle épidémie chez les gays.

5. Bibliographie et documents utiles

En français :

  • Institut de Veille Sanitaire (2011) : « Dossier hépatites virales de l’InVS » et « l’hépatite C » (malheureusement plus en ligne à présent).
  • Prévalence des hépatites B et C en France en 2004. Meffre C, Le Strat Y, Delarocque-Astagneau E, Antona D, Desenclos JC. Institut de veille sanitaire, Saint-Maurice, mars 2007. 114p.
  • Cas d’hépatite aigüe C récents chez des homosexuels masculins atteints par le VIH en Ile-de-France entre 2001 et 2004. Travail collaboratif entre cliniciens de l’AP-HP, épidémiologistes et sociologues du Département des maladies infectieuses de l’InVS, de l’Inserm et de l’université Bordeaux II. Saint-Maurice, 2004.
  • Institut National de Prévention et d’éducation pour la santé (INPES) : Les pages hépatites
  • INPES et Hépatites Info Service (0800 845 800) : « Sexe entre hommes et hépatite C, ce qu’il faut savoir »
  • SOS hépatites (2011) « Le foie et les hépatites »

 

En anglais :

Notes du dossier :

[1] Hépatite vient du grec « hépar » (foie) et « ite » (inflammation) – et veut donc dire « inflammation du foie »

[2] Le foie est un organe qui filtre le sang des impuretés de notre alimentation, de notre consommation de médicaments ou de drogues.

[3] Les symptômes, rares, incluent : fatigue, léthargie (manque d’énergie), nausée, douleurs abdominales, appétit réduit, jaunisse (peau et blancs des yeux jaunâtres) et/ou urine foncée.

[4] Sérum : le sang, débarrassé d’agents anti-coagulants

[5] La fibrose est une lésion du tissu qui devient plus fibreux à mesure que meurent les cellules de l’organe. Dans le cas d’une fibrose du foie, le tissu perd de sa flexibilité, et perd aussi de sa fonction de filtrage du sang.

[6] La cirrhose se produit lorsque le foie se recouvre de fibroses, se décompose progressivement en se remplissant de tissu graisseux. Le foie perd toute fonction de filtrage du sang.

[7] Nosocomiale : attrapée à l’hôpital

[8] Marincovich, B., Castilla, J., Del Romero, J., García, S., Hernando, V., Raposo, M., & Rodríguez, C. (2003). Absence of hepatitis C virus transmission in a prospective cohort of heterosexual serodiscordant couples. Sexually Transmitted Infections, 79(2), 160 –162. doi:10.1136/sti.79.2.160

[9] Cairns, G. (2009) « Hepatitis C in HIV positive gay men : Amsterdam, Paris, New York and UK compared »

[10] Enquête sur transmission au sein de couples séro-discordants

[11] Stapelton, JT et al. (2011) « The GB viruses : a review and proposed classification of GBV-A, GBV-C (HGV), and GBV-D in genus Pegivirus within the family Flaviviridae » Journal of General Virology. February ; 92(Pt 2) : 233–246.

[12] Tillman HL et al. (2001) « Infection with GB virus C and reduced mortality among HIV-infected patients. » New England Journal Medicine, Sep 6 ;345(10):715-24.