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Dépistage du VIH et diagnostic de l’infection

par | 23.04.2014

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Le premier outil de la lutte contre le sida n’a pas été le préservatif mais le dépistage. La première chose permise par la découverte du virus en 1983 fut la conception et la fabrication de moyens de diagnostic notamment par les tests de dépistage. Depuis, ces tests ont considérablement évolué tant en sensibilité qu’en précision. Pourtant, quelle que soit la technique employée, il reste toujours un problème : le temps nécessaire entre la contamination et le moment où un test peut la détecter.

Mais comment s’y prend-on pour dépister cette infection ? On utilise des signes biologiques objectifs observables à l’aide de techniques, de marqueurs, dont le plus classique est la présence dans le sang d’anticorps fabriqués par le système immunitaire contre l’envahisseur. Il faut un certain temps à l’immunité pour déclencher la fabrication d’anticorps puis pour en obtenir une quantité détectable dans le sérum sanguin, c’est-à-dire le sang débarrassé des cellules (globules rouges et blancs notamment) qu’il contient. Les tests de dépistage consistant à détecter la présence d’anticorps anti-VIH spécifiques et la période d’apparition de ces anticorps s’appelle la séroconversion.

Sans revenir sur les détails de l’histoire, c’est grâce à de nombreux travaux que le modèle actuel décrivant l’évolution des marqueurs de l’infection a été établi. Il porte le nom de son auteur, Fiebig., qui, en 2003, a affiné avec son équipe celui proposé dès 1995 par Busch et ses collaborateurs. Bien que ce modèle ne soit pas systématiquement applicable à chaque individu, il représente le déroulement type d’une séroconversion, c’est à dire la succession des événements biologiques décelables permettant de caractériser la séroconversion.

depistage VIH modele Fiebig
  • Phase indétectable : pendant les 11 premiers jours environ qui suivent la transmission, la réplication virale est limitée aux muqueuses puis aux tissus lymphatiques. Cette réplication étant locale, rien ne permet alors de la mettre en évidence, de la détecter ou même de l’étudier.
  • Stade I : à partir du 12e jour, l’ARN viral est présent dans le sang en quantité suffisante pour être détectable. Cette phase a une durée de 5 jours (Intervalle de Confiance de 95% : entre 3,1 et 8,1 jours) durant laquelle seule la détection de l’ARN du VIH est positive. Cette recherche se fait comme une mesure de charge virale utilisée pour le suivi médical des séropositifs, en amplifiant par la technique de PCR, l’ARN du virus susceptible d’être présent dans un échantillon de sang prélevé à la personne testée.
  • Stade II : à partir du 17e jour, commence la phase II d’une durée de 5,3 jours (IC 95 : [3,7 – 7,7]) à partir de laquelle une recherche de l’antigène p24 devient positive. Il s’agit là d’une recherche dans un échantillon de sang de la protéine p24 (capside, voir 3.1.4.2 Les gènes structurels du virus) qui se fait en laboratoire en utilisant un test de type ELISA capable de détecter l’antigène p24. C’est aussi à ce stade que l’ADN proviral devient détectable dans un échantillon de sang.
  • Stade III : d’une durée de 3,2 jours (IC 95 : [2,1 – 4,8]), il commence environ 22 jours après la transmission. A partir de ce stade, le test de dépistage du VIH ELISA est positif. Ce test consiste à détecter la présence d’anticorps anti-VIH sans un échantillon de sang prélevé à la personne testée.
  • Stade IV : d’une durée de 5,6 jours (IC 95 : [3,8 – 8,1]), il commence environ 25 jours après la transmission. C’est à partir de là que le test VIH de confirmation type Western Blot commence à réagir. Comme ce test consiste à détecter de manière précise et détaillée les différents anticorps anti-VIH présents dans un échantillon de sang prélevé, ce sont les premiers qui apparaissent à ce stade et le test donne un résultat incertain.
  • Stade V : d’une durée de 69,5 jours (IC 95 : [39,7 – 121,7]), il commence environ 31 jours après la transmission. A ce stade, le test VIH de confirmation type Western Blot est positif. Il est capable de détecter l’ensemble des anticorps anti-VIH à l’exception de ceux dirigés contre la protéine p31. Le résultat positif de ce test confirme la séroconversion (passage de séronégatif à séropositif pour le VIH) de la personne testée.
  • Stade VI : au-delà du stade V, c’est-à-dire environ 100 jours après la transmission, commence le dernier stade. Ce n’est qu’à ce stade que le test VIH de confirmation du VIH type Western Blot est complet.

Encore une fois, les durées de ce modèle sont des valeurs moyennes dont se rapprochent le plus la majorité des cas étudiés. Elles sont susceptibles de varier d’un individu à l’autre comme le traduisent les intervalles de confiance des valeurs de référence. Ces intervalles sont ceux dans lesquels se trouvent 95% des résultats des personnes qui ont permis d’établir ce modèle. Les durées réelles peuvent varier notamment avec l’état de la personne. Par exemple, les hépatites sont susceptibles de rallonger le délai de séroconversion de manière importante.

Chaque fois qu’un test est dit positif, cela signifie qu’il a atteint le seuil dans la technique employée à partir duquel il est détecté comme positif. Tous les tests décrits ici restent positifs au moins tant qu’aucune intervention n’est réalisée à l’exception de l’antigénomie p24 (stade II). Cette mesure atteint typiquement un maximum 21 jours environ après la transmission puis décroît au fur et à mesure de l’apparition dans le sang des anticorps anti-p24, vers le 25e jour selon le modèle.

On constate sur ce modèle que la détection de l’infection chez une personne ne peut se faire qu’après un certain temps alors que le virus est déjà présent dans l’organisme et donc que cette personne est potentiellement en mesure de transmettre le virus. Ce modèle explique aussi pourquoi la bonne pratique consiste à recommander un test trois mois après une suspicion de transmission et non pas tout de suite.

Source :
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Il nous a semblé utile de publier cet article extrait du guide « Des Bases pour comprendre » édité par Act Up Paris afin de revenir sur un point important à l’heure où l’on parle de transmission et de charge virale indétectable pour souligner le fait que malgré les annonces susceptibles de soulager les séropositifs du risque de transmettre à partir du moment où ils sont bien suivis, il n’en demeure pas moins que pendant un certain temps après la contamination, un nouveau séropositif ne connait pas son état.

Cela a deux implications :

  • d’une part, il est absolument nécessaire de protéger ses rapports avec des personnes dont le statut n’est pas connu,
  • le risque de transmission est particulièrement fort pendant la période de séroconversion.

Enfin, cet article explique clairement les limites du dépistage et montre combien il est nécessaire d’y avoir recours régulièrement.